09/06/2022
Gynécologie et Obstétrique
Santé Publique et Médecine Sociale
La
vaccination contre le virus du papillome humain (HPV) réduit jusqu'à 90 % le
risque d'infection au sérotype vaccinal HPV, et diminue la prévalence de la
dysplasie cervicale de haut grade et de néoplasie cervicale. Cependant, la
protection varie en fonction de la couverture vaccinale au sein d'une
population, principalement en raison des différences de protection croisée
contre les infections à HPV de sérotype non vaccinal. Par ailleurs, la
protection vaccinale contre les lésions CIN-2 (Cervical Intra épithélial
Neoplasia de grade 2) ou un diagnostic plus sévère est plus importante chez les
patientes initiant le schéma vaccinal avant l'âge de 17 ans en comparaison à
celles débutant après l’âge de 20-21 ans. Les recommandations actuelles américaines
en matière de dépistage du cancer du col de l'utérus ne font pas de distinction
en fonction du statut vaccinal. Néanmoins, aux États-Unis, seulement 61,4 % des
femmes sont actuellement à jour vaccinal contre l’HPV à l'âge de 17 ans. Ainsi,
des estimations complémentaires basées sur des données cliniques sont
nécessaires pour déterminer la stratégie de dépistage optimale selon le statut
vaccinal.
L'objectif
principal d’une étude récente publiée dans le JAMA était de comparer la valeur
prédictive positive (VPP) de la cytologie cervicale anormale pour diagnostiquer
une CIN-2 ou une lésion plus sévère en fonction du statut vaccinal HPV. Les
objectifs secondaires étaient de déterminer les variations de la VPP en
fonction de l'âge de début de la vaccination et du nombre de doses reçues. Il
s’agit d’une étude de cohorte rétrospective menée par le biais d'un examen des
dossiers médicaux électroniques aux Etats-Unis, ayant inclus des patientes âgées
de 21 à 35 ans, participant au dépistage du cancer du col de l’utérus, et ayant
eu au moins un résultat cytologique au sein d'un unique établissement de santé
entre janvier 2015 et décembre 2018. Les patientes dont la cytologie de
dépistage était anormale et qui n'avaient pas obtenu de résultats de tests
diagnostiques ont été exclues de l'analyse. Les données ont été analysées de
décembre 2019 à novembre 2021. Le statut vaccinal positif a été défini par
l’administration d’au moins une dose vaccinale HPV. Des analyses en
sous-groupes ont été effectuées pour les patientes ayant reçu un schéma
vaccinal complet selon les directives de l'Advisory Committee on Immunization
Practices et en fonction de l'âge auquel a été initiée la vaccination (moins de
21 ans versus 21 ans ou plus).
Au
total, 46 988 patientes, d’âge moyen 28,7 (+/- 4,5) ans, ont été incluses,
parmi lesquelles 15 494 (33,0%) étaient au moins partiellement vaccinées
et 4 289 (9,1%) avaient des résultats cytologiques anormaux sur la période étudiée.
Parmi ces dernières, la VPP pour le diagnostic de lésions classées CIN-2
ou plus sévères était plus faible chez les personnes vaccinées (17,4% ; IC95% :
[16,4%-18,4%]) que chez les personnes non vaccinées (21,3% ; IC95% :
[20,4%-22,3%]). La VPP était par ailleurs significativement plus faible
chez les patientes ayant bénéficié d’un schéma vaccinal complet versus incomplet
(15,9% versus 22,4%), en particulier lorsque la vaccination avait débuté avant
21 ans (11,9% versus 30,7% à l’âge de 21 ans ou plus).
Ainsi,
dans une population américaine pour laquelle la couverture vaccinale contre HPV
était relativement faible, la VPP de la cytologie du col de l'utérus pour le
diagnostic de lésions classées CIN-2 ou plus sévères était significativement
plus faible parmi les individus vaccinés. La VPP diminuera probablement à
l'avenir, à mesure que la population bénéficiant d'une meilleure couverture
vaccinale contre HPV vieillit et se soumet au dépistage. Partant du postulat
qu’au fur et à mesure que la prévalence d’une pathologie (ici lésions CIN-2 ou
plus sévères) diminue, la VPP d’un test diminue également (et le nombre de faux
positifs augmente), les auteurs précisent que la confirmation de ces résultats pourrait
justifier une évolution dans la stratégie de dépistage, notamment pour les femmes
ayant bénéficié d’une vaccination complète et précoce, dès lors qu’elles étaient
âgées de moins de 21 ans. Autrement dit, d’après les auteurs, le risque accru
observé d'un résultat faussement positif de la cytologie cervicale chez les
personnes vaccinées contre HPV pourrait justifier une stratégie de dépistage ajustée
selon le statut vaccinal, chez les personnes sus-citées présentant un faible
risque de cancer du col de l'utérus.
Source(s) :
Teoh D, Nam G, Aase DA, et al. Test Performance of Cervical Cytology Among Adults With vs Without Human Papillomavirus Vaccination. JAMA Netw Open. 2022;5(5):e2214020. ;